Barcelone : Ada Colau défend son bilan et propose une alliance au PSC et à ERC

Barcelona en Comú, après avoir gouverné la capitale catalane pendant huit ans (Ada Colau étant maire), se retrouve en troisième place aux élections municipales. Devant un morcellement des forces en présence, les négociations pour le « gouvernement » municipal n’ont abouti à aucune alliance. En Comú a fait barrage à Xavier Trias (Junts, indépendantistes de droite), faisant élire maire Jaume Collboni (PSC) mais sans accord de gouvernement ; Ada Colau, dans son discours après l’investiture du maire, a plaidé qu’une alliance de gauche est encore possible. Elle permettrait de sauvegarder le travail réalisé à Barcelone par le mouvement citoyen né dans la lignée de la lutte des Indignés.

Ada Colau, maire de Barcelone (au centre). Photo d’archives.

Les élections municipales à Barcelone, le 28 mai dernier, ont donné, comme les précédentes, un résultat très fragmentaire, attendu, compte tenu des forces en présence mais aussi du mode de scrutin, proportionnel (à la différence de la France, où la liste arrivée en tête au second tour obtient automatiquement la majorité absolue des sièges).

Les résultats : Junts per Catalunya 11 sièges de conseillers ; PSC (Parti socialiste catalan) 10 ; Barcelona en Comú 9 ; ERC (Esquerra republicana de Catalunya, indépendantistes de gauche) 5 ; PP (Parti populaire, droite) 4 ; Vox (extrême droite) 2. Soit 41 sièges, la majorité étant à 21.

Avant l’élection du maire, qui avait lieu le 17 juin, les négociations pour former une majorité municipale sont allées bon train mais n’ont pas abouti.

Les indépendantistes (Junts et ERC) auraient voulu prendre la tête de la mairie mais une alliance était impossible avec le PSC ou le PP, anti-indépendantistes, ou avec Barcelona en Comú, qui considère Junts trop à droite.

Barcelona en Comú a proposé une alliance « de gauche » au PSC et à ERC, mais elle n’a pas abouti.

Au moment du vote, le 17, Xavier Trias, bien que représentant le parti arrivé en tête, n’a pas obtenu la majorité, se faisant dépasser par Jaume Collboni, élu avec les voix de Barcelona en Comú et du PP. Mais quelle va être la suite ? Le discours d’Ada Colau, lors de la cérémonie d’investiture du maire, en donne une idée.

Pas de normalisation de l’extrême droite

La maire sortante a tout d’abord noté l’entrée de l’extrême droite (Vox) pour la première fois au conseil municipal de Barcelone : « Ils ont le droit d’être ici, ils ont été élus », a-t-elle dit, « mais nous n’avons pas l’intention de normaliser leur présence et encore moins leur discours de haine et leurs politiques qui attentent aux droits humains, au droit des femmes, des LGBTI et des personnes migrantes. »

« Nous avions la responsabilité d’éviter un gouvernement de Junts »

Elle s’est ensuite adressée à Xavier Trias, expliquant pourquoi Barcelona en Comú ne pouvait pas le laisser élire maire : « Vous avez eu le plus grand nombre de voix, et je le respecte, mais nous avons deux modèles de ville opposés (…) Vous vouliez défaire ce que nous avons fait ; nous avions la responsabilité d’éviter un gouvernement de Junts mené par vous, Junts qui s’est opposé à nous dans le mandat précédent. »

Ada Colau rappelle que lorsqu’il a été maire, de 2011 à 2015 (pour Convergència i Unió, la coalition indépendantiste d’alors), Xavier Trias avait « lâché la bride à la spéculation, au tourisme de masse », avait fait preuve d’inaction en matière de transports publics, de quartiers populaires, « et votre parti a voté contre la régulation des loyers qui est l’une des choses dont la ville de Barcelone a le plus besoin aujourd’hui. »

Elle ajoute : « Seules les élites de la ville ont voté pour Junts per Catalunya. »

A Collboni : « Vous ne pourrez pas gouverner Barcelone avec 10 conseillers. Faisons un pacte de gauche »

Ada Colau s’adresse ensuite à Ernest Maragall, la tête de liste d’ERC : « Je regrette beaucoup la façon dont vous avez travaillé à faire échouer un pacte de gauche. »

Elle poursuit : « Nous avons voté Collboni sans enthousiasme, pour le moindre mal. Nous continuerons à nous battre pour un pacte de gauche qui représente la majorité des citoyens de cette ville. » Rappelons que Barcelona en Comú avait proposé une alliance avec le PSC et ERC où le poste de maire aurait été exercé à tour de rôle par les trois tendances. Le PSC avait répondu : « A Barcelone, les gens ont voté pour le changement ; le PSC est l’unique force qui peut espérer rassembler une large majorité. »

« Notre vote » (pour Collboni contre Trias), précise ensuite Ada Colau, « n’est pas un vote anti-indépendantiste ; nous avons aussi de nombreux indépendantistes à Barcelona en Comú. Notre vote vise à construire la ville, les quartiers (…) et des politiques concrètes. »

Puis elle se tourne vers Jaume Collboni : « Vous avez proposé un pacte de coalition secret, en comptant sur les voix du PP ; nous avons refusé. » (En votant pour vous sans accord) « nous ne vous avons pas offert nos votes ; avec 10 conseillers il est impossible de gouverner Barcelone (…) Nous voulons un pacte de gauche. »

Elle définit les « politiques concrètes » que pourrait mener à bien « un gouvernement (municipal) progressiste », dans la droite ligne des deux mandats précédents : investissement dans les écoles publiques, pacification des rues, poursuite du développement du logement social, des coopératives d’habitat, de l’économie sociale et coopérative, plan quartiers (la municipalité précédente a multiplié par trois les investissements en faveur des quartiers populaires), politique de soins, politiques féministes. « Nous avons eu le courage d’affronter les fonds vautours, de nous opposer à la massification touristique », précise Ada Colau qui conclut : « C’est ce que nous défendons ; la seule majorité progressiste possible (pour mener cette politique) c’est avec l’ERC, le PSC et Barcelona en Comú. Nous sommes disponibles. »

La balle est dans le camp des socialistes catalans et d’ERC. Qu’est-ce qui va primer pour eux, les intérêts de parti et personnels ou la poursuite d’une gestion municipale dans l’intérêt des habitants ?

Ph.C.

Voir la vidéo du discours d’Ada Colau (en catalan) :

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